Mesdames, Messieurs,
Les Membres de « Charleroi Respire »,
Suite à votre courrier concernant le Trident Light, je vous invite à découvrir un point de vue étayé par des propositions sur la question. « Des » propositions car, selon moi, il n’existe pas une solution unique mais des mesures à mettre en œuvre pour apporter une solution durable à la mobilité au sud de Charleroi.
Résident et Echevin de la Mobilité à Gerpinnes, commune directement concernée par le projet du Trident Light, je suis particulièrement sensibilisé par ce dossier. Ma position a toujours été très claire et correspond à celle formulée par le Conseil communal de Gerpinnes en date du 18 janvier 2018 : CONTRE le projet de Trident Light tel qu’il a été présenté, POUR des solutions réalistes et réalisables.
Pourquoi l’option Trident Light n’est pas envisageable de notre point de vue ? D’abord parce que la présentation de l’auteur de projet n’était pas à la hauteur de nos attentes ni celles des citoyens au vu des nombreuses réactions formulées par ces derniers lors de l’étude d’incidence. La manière dont l’étude a été envisagée ne l’est pas non plus. Jamais on ne parle de l’humain, des citoyens, des résidents directement concernés par l’option Trident Light. Le Bourgmestre de Gerpinnes, Philippe BUSINE, n’a d’ailleurs pas manqué d’interpeller l’auteur de projet en séance à ce propos ; c’était le 10 novembre 2017 à Loverval.
L’étude ne montre pas non plus si l’E420 se dessine en souterrain ou en aérien, ni si elle passe sous la N5 et la rue de la Blanche Borne ou au-dessus. Il peut aussi évoluer dans un couloir de 150 m ; ça peut tout changer pour certains riverains. Tel qu’il a été présenté, il n’apporte aucune garantie quant au confort des riverains (acoustique, visuel, qualité de l’air). Bien au contraire, le tracé proposé frôle les quartiers plutôt que de s’en écarter. Encore une fois, l’humain est négligé.
A ceux qui évoquent des articles de presse de 2017 dans lesquels le Bourgmestre de Gerpinnes marquait son accord de principe sur l’option Trident, je réponds que c’était sur la base d’un croquis présenté par le Cabinet et surtout sous le couvert de garanties pour les riverains. Elles n’apparaissent nulle part dans l’étude.
Aussi, depuis la publication de l’étude, la ville de Charleroi, le pôle environnement et le pôle aménagement du territoire suggèrent de renoncer au Trident Light pour se concentrer uniquement sur la branche Est, non plus en 2x1 bande mais en 2x2 bandes. L’argumentaire est écologique et économique : moins de nature sacrifiée, moins d’ouvrages d’art à réaliser. Si l’argumentaire tient la route, le Trident a été imaginé en raison de la saturation du R3 entre Chatelet et Marcinelle. A cet endroit, il est impossible d’élargir le R3 en raison de la présence de tunnels et viaducs. Une seule branche risquerait de créer d’autres problèmes ailleurs sans solutionner la cause initiale.
La Rocade Namuroise semble dès lors se dessiner comme une alternative plausible. La N97 est déjà en 2x2 bandes en partie. Il en va de même pour la N98 entre Fosses-La-Ville et l’autoroute E42. « Reste » à joindre les deux bouts dans une région moins peuplée, où il est possible de dessiner un itinéraire en rase campagne. Evidemment, tout le monde ne le verra pas du même œil… Cette alternative apparaît plus simple à mettre en œuvre (sur papier) et non moins efficace pour garantir l’essor économique de la région de Charleroi. Une rapide simulation sur un outil de navigation montre que la Rocade Namuroise permettant de faire la jonction entre Philippeville et Heppignies, et donc d’accéder aux principales zones d’activité de Charleroi, allonge le parcours de 14 km seulement par rapport à la ligne droite mais très encombrée N5.
Si l’on parvenait déjà à délester cette dernière des poids lourds en transit, qui n’ont dès lors rien à faire dans la banlieue de Charleroi, la situation serait améliorée. En effet, par leur longueur et leur masse, les poids lourds souffrent d’une inertie conséquente dans les ronds-points et carrefours, sans compter la consommation de ces mastodontes qui explose à chaque démarrage. Il est donc préférable de les diriger vers un itinéraire plus fluide et sans conséquence pour ainsi dire sur leur temps de parcours.
Il conviendrait alors de réaliser une nouvelle étude pour vérifier si d’autres aménagements routiers sont nécessaires sur la N5, appelée à devenir un boulevard urbain. Une véritable piste cyclable est déjà programmée en site propre entre « Ma Campagne » et « Le Bultia ». Elle s’inscrit dans le projet du Bus à Haut Niveau de Service (BHNS) qui vise à relier Montigny-le-Tilleul et Mont-sur-Marchienne d’un côté vers Gerpinnes de l’autre en passant par Charleroi ; un autre élément de taille dans l’aménagement de la N5. A l’heure où ces lignes sont rédigées, le BHNS stoppe sa route à hauteur de « Ma Campagne » sur la N5. Or, nous aimerions le voir prolongé jusqu’au Bultia pour encourager l’utilisation par les riverains et faciliter l’accès aux centres commerciaux. Les responsables du projet indiquent qu’il serait impossible de tenir la fréquence de passage (7’30’’ en heures de pointe, 15’ en heures creuses) en raison du trafic important à hauteur du rond-point du Bultia. Et si nous tentions de traiter le problème en amont ? En remontant jusque Tarcienne voire Somzée avec le BHNS, on offrirait la possibilité aux navetteurs de ne plus devoir affronter les embouteillages du rond-point du Bultia. En allongeant le BHNS et en multipliant les parkings relais P+R (500 places envisagées à Couillet, 250 programmées à « Ma Campagne », autant à Tarcienne ?), nous pourrions aussi encourager le covoiturage et soulager un peu encore plus la N5.
Tous les partis politiques semblent s’accorder sur la nécessité de renforcer l’offre de transports en commun. Les voyageurs des lignes SNCB 132 et 134 qui font la jonction entre Charleroi et Couvin n’attendent que ça. Bénéficier de transports en commun performants en élargissant la plage horaire sans négliger les plus petites gares pourraient encourager des automobilistes à abandonner la voiture dans le cadre des trajets quotidiens. Cela vaut aussi pour les services des TEC dont le réseau optimisé pourrait faciliter le transport des élèves vers les écoles et soulager nos voiries communales aux heures de pointe. A nous aussi, communes, d’investir dans un véritable réseau cyclable.
Déviation du charroi lourd via un itinéraire plus efficient, extension du BHNS en amont du nœud du problème, amélioration de la performance des transports en commun entre Charleroi et la Botte du Hainaut (Wallonia Easy Line est en route), envisager un réseau cyclable sécurisé aux endroits opportuns ; voilà une série de mesures qui pourraient concrétiser un dossier âgé de plus de 40 ans.
L’heure est grave. Déjà saturée, la N5 s’apprête à déborder par le fait du trafic annoncé depuis la France. Si l’on ne fait rien à court terme, le trafic de fuite va déferler dans les quartiers en bordure de N5 pour se répandre dans nos communes en vue de rejoindre le R3. Ses répercussions se font déjà sentir et de nombreux riverains sont déjà impactés par les nuisances. Il n’y a aucune solution idéale qui conviendrait à tout le monde. Mais le statu quo n’est pas envisageable.
Il n’existe pas UNE mais DES mesures à mettre en œuvre pour améliorer la mobilité au sud de Charleroi sans ravager nos villages et en protégeant le bien-être, le confort et la qualité de vie de nos citoyens. C’est le projet que je défendrai quelle que soit l’issue des élections le 26 mai prochain.